Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/96

Cette page n’a pas encore été corrigée

Un prologue, plus court encore que celui de la Rédemption, résume en quelques mots la Mort et la Vie. « Il est terrible de tomber entre les mains du Dieu vivant », dit le chœur. La voix du Christ répond : « Je suis la résurrection et la vie. » Le chœur redit ces paroles et c’est tout. Le drame commence.

Ce prologue fait pressentir la Jugement qui remplira la seconde partie. Il n’y a que quelques notes, et cela est terrible ; on en pourrait dire ce que Hugo a dit de Baudelaire, qu’il avait créé un frisson nouveau. L’auteur a-t-il, comme Dante, vu l’enfer, pour nous en rapporter ce frisson sinistre ? Après Mozart et tous les génies qui lui ont succédé jusqu’à nos jours, après l’effrayant Tuba mirum de Berlioz, il a trouvé moyen de nous faire dresser les cheveux sur la tête. C’est incroyable, mais cela est. Ici encore, je ne puis m’empêcher d’admirer l’étonnante disproportion apparente entre la grandeur de l’effet et la simplicité de moyens qui échappent à l’analyse.

Lu première partie, Mors, n’est autre chose qu’un immense Requiem, qui dure deux heures complètes. L’intérêt n’y languit pas un instant. L’auteur a donné amplement carrière à ce sentiment vocal dont nous parlions plus haut et dont il avait la spécialité. Non qu’il ait renoncé à son orchestration si habile et si fondue ; il a trouvé dans le mélange de l’orgue et de l’orchestre des effets nouveaux et singulièrement heureux ; mais les airs, les ensembles,