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dans son œuvre ? On serait tenté d’y voir un défaut. Défaut ou qualité, ce caractère est rare en musique : absent des œuvres de Haydn et de Mozart, il se montre à peine dans celles de Sébastien Bach et de Beethoven ; nous le trouvons, parmi les modernes, chez Verdi, chez Liszt, mais, de tous les compositeurs connus, lequel a été le plus grandiloquent, le plus emphatique ? Haendel, que personne assurément n’accusera de manquer de force, ni de véritable grandeur.

Avec Mme Viardot, nous entrons dans un autre monde. Cette femme célèbre n’était pas seulement une grande cantatrice, mais une grande artiste et une encyclopédie vivante : ayant fréquenté Schumann, Chopin, Liszt, Rossini, George Sand, Ary Scheffer, Eugène Delacroix, elle connaissait tout, en littérature et en art, possédait la musique à fond, était initiée aux écoles les plus diverses, marchait à l’avant-garde du mouvement artistique ; pianiste de premier ordre, elle interprétait chez elle Beethoven, Mozart, et Reber qu’elle appréciait beaucoup. Il n’est pas difficile de s’imaginer combien un pareil milieu devait être propice à l’éclosion d’un talent naissant. Le goût du chant, naturel à Gounod, se développa chez lui plus encore : aussi la voix humaine fut-elle toujours l’élément primordial, le palladium sacré de sa cité musicale.