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des dernières œuvres de son auteur. Elle me semble, à moi, si touchante ! Découragement et désillusion, regrets de quitter la vie, pensées religieuses, espérance et confiance en l’immortalité, elle exprime tout cela sous une forme éloquente et captivante. N’est-ce donc rien ?

Peut-être la crainte de paraître partial, en louant toujours, a-t-elle inspiré ce jugement qui m’étonne ; cette crainte me hante aussi quelquefois moi-même, quand je parle de Liszt. On ne s’est pas fait faute de railler ce qu’on a appelé ma faiblesse pour ses œuvres. Lors même que les sentiments d’affection et de reconnaissance qu’il a su m’inspirer viendraient, comme un prisme, s’interposer entre mon regard et son image, je ne verrais rien en cela de profondément regrettable ; mais je ne lui devais rien, je n’avais pas subi sa fascination personnelle, je ne l’avais encore ni vu ni entendu quand je me suis épris à la lecture de ses premiers Poèmes symphoniques, quand ils m’ont indiqué le chemin où je devais rencontrer plus tard la Danse macabre, le Rouet d’Omphale et autres œuvres de même nature ; je suis donc sûr que mon jugement n’est altéré par aucune considération étrangère et j’en prends l’entière responsabilité. Le temps, qui met chaque chose en place, jugera en dernier ressort.