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respect que d’admiration, s’efforcent d’introduire dans nos mœurs une foi tolérante, un esprit à la fois scientifique et religieux. Quand je lis leurs admirables articles, leurs variations étincelantes sur ce sujet, je ne puis, malgré tout mon respect, éloigner de mon imagination les images irrévérencieuses du civet sans lièvre, du mariage de la carpe et du lapin. Ces grands esprits ne veulent voir que la surface de la question et négligent volontairement le fond, qu’ils connaissent mieux que personne ; on est pourtant bien forcé d’y venir un jour ou l’autre. Une religion n’est une religion que par sa prétention à enseigner la vérité absolue, dont le dépôt lui a été confié par une révélation surnaturelle. On ne transige pas avec la vérité absolue. Aussi la foi engendre-t-elle logiquement l’intolérance, le fanatisme et, en dernier ressort, le mysticisme, qui est le renoncement à tout ce qui n’est pas la vérité révélée. On ne veut pas qu’il en soit ainsi, et l’on s’en prend à la logique : « Rien n’est plus faux, » dit-on couramment, comme on disait, il y a cinquante ans, « rien, n’est méprisable comme un fait ». Ce sont là des modes, comme les chapeaux.

Si nous analysons la foi artistique, nous nous trouvons en présence d’un ordre d’idées tout différent. La foi artistique ne se réclame d’aucune révélation surnaturelle ; elle ne saurait prétendre à l’affirmation de vérités absolues. Elle n’est qu’une conviction, formée en partie des études de