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théâtrale. Au temps jadis, il n’en allait pas ainsi. On montait les petits ouvrages avec soin et dans la bonne saison ; s’ils réussissaient, on les faisait vivre et ils comptaient, tout autant qu’une grande pièce, à l’actif de l’auteur ; sinon, ils étaient oubliés et l’auteur recommençait le lendemain.

Aujourd’hui c’est le contraire. Si le petit ouvrage réussit, on l’oublie ; s’il tombe, on s’en souvient.

Victor Massé avait eu la fortune de venir dans un bon moment ; de plus, il a été un musicien très français. C’est un des maîtres en qui se sont fondus le plus complètement, surtout dans ses premiers ouvrages, les éléments divers qui ont concouru à former l’École française. Plus tard, en cherchant à élargir sa manière, l’auteur de Galathée avait un peu battu les buissons.

Est-ce une erreur de mon jugement ? Il me semble qu’en voulant faire grand, il faisait gros. Dans sa jeunesse, il se laissait aller à sa nature, sans arrière-pensée, montrant les plus heureux dons naturels, un sentiment pénétrant, une couleur éclatante, une vitalité prodigieuse, un charme irrésistible.

Croirait-on maintenant, pourrait-on même supposer qu’il fût traité alors de révolutionnaire, de musicien trop avancé ? C’est pourtant la vérité. Il me souvient des lances que j’ai rompues pour Galathée notamment avec les musiciens de l’orchestre du théâtre ; et comme je cherchais a connaître les causes de leur hostilité, je finis par découvrir cette chose affreuse : l’auteur, à mainte page de sa partition,