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cela n’a rien a voir avec la trivialité dont ses prédécesseurs les plus illustres dans l’opéra et l’opéra-comique français n’ont pas toujours su se garder. Il visait haut, mais le souci constant de l’expression devait fatalement, comme tout ce qui tient au réalisme, le ramener de temps en temps sur la terre. Ce réalisme lui-même ouvrait une voie féconde et absolument nouvelle en musique. Pour la première fois, à la peinture de l’union des cœurs et des âmes s’est ajoutée celle de la communion des épidermes, du parfum des cheveux dénoués, de l’enivrement des haleines sous les effluves du printemps. J’ai vu des natures chastes et hautement compréhensives s’effaroucher de ces innovations, accuser Gounod d’avoir rabaissé, matérialisé l’amour au théâtre. Que d’autres seraient heureux de mériter un tel reproche !

Bien d’autres nouveautés lui sont dues. Tout d’abord, il restaura des procédés abandonnés depuis longtemps sans aucun profit, et ce fut une stupeur, parmi les élèves du Conservatoire, de voir remettre en honneur des moyens surannés et discrédités, comme les « marches d’harmonie », dont le prélude de la scène religieuse de Faust offre un si remarquable exemple. Désireux de laisser à la voix tout son éclat, toute son importance, il supprima les bruits inutiles, dont personne alors ne croyait pouvoir se passer. — Un jour, avec l’imprudence de la jeunesse, je demandais à un savant professeur la raison de cet abus de trombones, de grosses