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TANDIS que j’errais parmi les sables nostalgiques, — la mer du désert, — a surgi tout à coup devant moi, hardi sur son aristocratique cheval, un arabe superbe.

Il était beau, divinement. Il était si beau que j’ai rougi.

Il m’a vue. Un éclair a traversé ses yeux obscurs et lumineux.

Alors, parce que tous les mâles de tous les temps, de tous les pays et de toutes les religions, ont confondu et confondront toujours l’admiration avec le désir, il a voulu me posséder.

Je suis celle qu’on ne possède pas.

Mon instinct viril et mon orgueil ont étincelé avec la lame de mon poignard.

Au cœur, j’ai frappé le bel arabe.

Le bel arabe, je l’ai tué.

J’ai tué la divine beauté d’homme qui m’avait vu rougir. Mais tout le jour et toute la nuit et toutes les nuits d’une orbe lunaire, j’ai veillé dignement son corps, car, couchée