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LES étoiles rouges, je les ai volées.

Pour elles, je suis descendue au fond de la mer, et sur mon cœur de chair je les ai rapportées.

Elles n’étaient pas mortes car la mer et le ciel sont d’un même azur. Elles se sont tordues, détruisant la divine harmonie de leurs cinq pointes. Pour leur imposer l’orgueil de mon cœur qui saigne et qui se tait, j’ai pris à la mer trois blocs de rochers, et sous leur lourdeur j’ai immobilisé l’harmonie des cinq pointes.

Quand j’ai levé les pierres, j’ai vu que tes trois étoiles avaient saigné. Mais leur sang est blanc, pâle comme la lune.

Je le savais bien qu’elles n’étaient pas rouges, mais seulement teintes de sang, du sang du cœur qu’elles ont traversé avant de choir dans la mer, tandis que le poète, sur la terrasse de l’attente, leur lançait son vœu.

Mais son vœu… n’était-il pas de donner son sang pour la Chimère ?