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vais traitements, que dans les autres il se contentoit de donner la liberté aux esclaves ; mais qu’il mettoit le feu à toutes les maisons dont les maîtres s’étoient éloignés.

Nous apprîmes en même-temps que le Gouverneur se disposoit à faire sortir un nouveau corps de troupes, que tous les colons qui avoient eu le tems de se retirer s’étoient armés avec quelques nègres qui leur restoient fidèles, & que ces forces ne tarderoient pas à fondre sur John. Nous vîmes ces nègres-marons chargés de butin, diriger leur retraite vers la montagne ; ils prirent leur route assez près de notre maison : une trentaine d’hommes se détacha de cette petite armée & s’avança vers nous ; le terrible John étoit à leur tête.

John, ou plutôt Ziméo, car les nègres-marons quittent d’abord ces noms Européens qu’on donne aux esclaves qui arrivent dans les colonies, Ziméo étoit un jeune homme de vingt-deux ans : les statues d’Apollon & de l’Antinoüs n’ont pas des traits plus réguliers & de plus belles proportions. Je fus frappé sur-tout de son air de grandeur. Je n’ai jamais vu d’homme qui me parût, comme lui, né pour commander aux autres : il