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LES SAISONS 135

malheureux ceux qu’on ne peut pas rendre bons » & je pars pour le Japon & pour la Chine.

Je demande aux Japonois & aux Chinois quels avantages ils ont tiré de leur commerce avec nous.

Les premiers me répondent qu’il en a coûté la vie à quatre ou cinq cent mille d'entr'eux, pour avoir fait connoissance avec les Jésuites.

Les Chinois me disent que nous méritons le nom de demi-diables, qu'ils nous ont donné: que nous n’entendons rien à l'Agriculture, à la Police, à la Morale; & que s'ils n’avoient pas pris la sage précaution de nous arrêter sur leurs frontières, nous aurions corrompu leurs peuples, & bouleversé leur empire.

Après m’être assuré que la découverte de l'Amérique & celle du passage aux Indes, ont été funestes aux trois quarts des habitans du Globe; il me reste à examiner les biens qu’elles procuré à l'Europe.

Je vois d’abord une maladie terrible qui attaque les sources de la génération, & qu’on ignoroit avant que les Espagnols eussent abordé à Saint-Domingue.

Je ne puis douter que l'usage immodéré du Café, du Thé, du Chocolat, des Epiceries, n'aient chez les Européens, une partie des effets que nos eaux-de-vie ont chez les Sauvages.

La masse de l'or & de l’argent, qui augmenta tout-à-coup en Espagne, inspira d'abord à Charles-Quint, & à son fils, le dessein d'attenter à la liberté de l’Europe, & fut l’aliment de