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132 LES SAISONS

211 Ici, les spectateurs, ce choix d'un peuple aimable, Sont encor à mes yeux un spectacle agréable.

Le coupable, que la présence des hommes fait rougir ; le fanatique, l'homme devenu insensible pour n'avoir pas exercé son cœur aux sentiments honnêtes ; le malheureux, qui a éprouvé d’extrêmes injustices, sont les seuls qui puissent voir sans plaisir les hommes rassemblés pour avoir du plaisir ; les secours , les services, les amusements que l’homme attend de l’homme, lui rendent son espèce agréable & chere. Chez un peuple riche, où regne le goût de la parure & un luxe élégant, le mêlange des couleurs douces & brillantes, répandu sur les vêtements d’une foule nombreuse, plaît beaucoup au sens de la vue : ce plaisir se mêle au sentiment de plusieurs autres plaisirs, & il faut le compter pour quelque chose.

213 Je compare les loix & les mœurs des deux mondes.

Je voudrois faire une question. La découverte de l’Amérique & celle du passage aux Indes par le Cap de Bonne-Espérance, ont-elles servi au bonheur de l’espece humaine ? Il faut d’abord interroger un Américain ; mais dans quelle contrée irai-je le prendre ? Si je choisis un Péruvien, il me fera le parallele de la tyrannie de ses maîtres modernes & de ce gouvernement sublime, sous lequel on ne connoissoit ni l’esprit de propriété, ni le mensonge, dont la bienveillance & l’esprit de