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Le soldat, plein de courage et d’effroi,
S’arme à la hâte. Hélène, impétueuse,
Vole mi-nue à la porte du camp ;
Sadit, Madel, Agrisoux, Hydamant
Courent par-tout. Ainsi, lorsque le vent
Trouble le sein d’Amphitrite écumeuse,
Le vieux Pilote, à l’aspect des rochers,
Appelle, éveille, assemble les Nochers.
L’un brise un mât, l’autre détend les voiles ;
L’un lorgne terre, et l’autre les étoiles ;
De ses méfaits chacun sent le remord,
Et fait des vœux dont il se rit au port.
Le généreux et noble Salamane,
Moins fier qu’Achille, et vaillant comme un âne,
Piquant des deux, et courant au galop,
Trouve les Francs à la porte de l’Ost,
Et furieux, reçoit à coup d’épée
De ces Messieurs l’espérance trompée.
À droite, à gauche, il renverse, il pourfend,
Couvre d’éclairs le bouclier, le casque,
Et le parvis est inondé de sang.
Les Francs, surpris d’une telle bourrasque,
Rendent à peine un timide combat ;
Avec l’espoir, leur courage s’abat.
Le premier rang sur l’autre se renverse,
Et le Héros, par sa fougue emporté,
De rangs en rangs s’avance, enfonce, perce,
Comme un rocher d’un mont précipité.
Le dur Odmar, le poli Bradanelle,
Le beau Rhimbon, et le laid Pyrabelle,
Viennent fougueux tomber sur les Gaulois.
Hélène accourt de mille hommes suivie :
Charles s’avance, on s’anime à sa voix ;
Des deux côtés on charge avec furie ;
La lune seule éclaire ces exploits,
Ces vaillants coups dignes de la lumière.
C’est grand’pitié de mordre la poussière
Dans la nuit sombre ; on voudrait, glorieux,