Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/80

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Deux beaux tetons sous un léger corset
Fort mal noué, par mégarde sans doute ;
D’un blanc mouchoir la transparente voûte
En trahissait le boutonnet charmant.
Et par mégarde encore apparemment.
Gentil souris que le souris de Nice,
Petit air fin et sans nul artifice,
Œil bleu, teint frais, cotillon blanc et court,
Laisse lorgner jambes faites au tour.
Ce n’était point du tout coquetterie ;
Mais Nice était apparemment grandie ;
L’amour avait arrondi ses deux bras.
Ainsi charmante, et ne s’en doutant pas,
Elle dansait sur un pied et sur l’autre,
À droite, à gauche allait dans la maison,
Faisait virer perfide cotillon,
Et marmottait joyeuse patenôtre.
L’impénitent et lubrique Aumônier
Ne se lassait icelle de lorgner,
Et convoitait son joyau de baptême.
Nicette alors apportait une crème
Moins blanche qu’elle. « Or ça. Belle, dit-il,
De son bras dur serrant son bras gentil ;
« Ça. la petite, a-t-on son pucelage ?
« Point ne mentons ; l’avons-nous ce bijou ?
« L’aurions-nous pas laissé dans le village ?
« Oui, n’est-ce pas ? » Vous importe-t-il où ?
Dit Nice, dont la pudeur outragée,
De lys en rose est tout à coup changée.
L’air elle avait, qu’elle aurait mieux voulu
Qu’Antoine Organt eût son beau bras tenu,
Même autre chose, et d’un coin de prunelle
On vous frisait le jeune Chevalier,
Qui bien souvent jetait les yeux sur elle,
D’un certain air qu’on savait épier.
Point ne parlait ; plus l’amour est extrême,
Moins il éclate en frivoles discours,
Et le silence, au temple des Amours,