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De s’enquérir du Saint Palladion ;
Marcel disait : Où pèche le félon ?
Antoine Organt, fils du saint personnage,
Se mit en quête, et courut maint rivage,
Accompagné de son Ange gardien.
Cet Esprit pur, sans doute Esprit de bien,
Le protégea dans ses longues prouesses,
Et le soutint dans ses jeunes faiblesses,
En lui prêchant les devoirs du Chrétien,
Et lui montrant les palmes éternelles
Que Dieu réserve à ses amis fidèles.
Le mauvais grain et les ronces charnelles
Germèrent mieux dans le cœur du vaurien !
Antoine Organt avait vu la prairie
Vingt fois déserte et vingt fois refleurie.
Vingt ans enfin s’étaient passés depuis
Que l’Archevêque, animé d’un saint zèle,
Vint élever son âme au Paradis
Entre les bras de la Nonnette Engelle.
Le sang Turpin dans ses veines bouillait,
Les yeux brillans de sa mère il avait ;
Mais c’était tout : car sa figure haute
N’annonçait point le fils d’une dévote.
Jà le contour de son jeune menton
Était bruni par un léger coton ;
Avec vigueur il maniait la lance.
Pour gouverneur il n’eut que des soldats ;
Chasses, tournois et joûtes, dès l’enfance,
Avaient durci ses membres délicats.
Au demeurant, c’était des hérétiques
Le plus affreux, se moquant des reliques,
Bernant les Saints, quelquefois le Seigneur,
Qui cependant l’aimait de tout son cœur.
D’ailleurs, il eut un Écuyer profane,
Grand indévot, grand Épicurien,
Ne connaissant de Dieu que la tocane ;
Qui lui prouva que le mal était bien,
Le corrompit, et n’en fit qu’un vaurien,