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du signe. Toutes nos richesses métalliques et territoriales sont représentées ; le signe de toutes les valeurs est dans le commerce ; et toutes ces valeurs sont nulles dans le commerce, parce qu’elles n’entrent pour rien dans la consommation. Nous avons beaucoup de signes, et nous avons très peu de choses.

Le législateur doit calculer tous les produits dans l’État, et faire en sorte que le signe les représente ; mais si les fonds et les produits de ces fonds sont représentés, l’équilibre est perdu, et le prix des choses doit hausser de moitié. On ne doit pas représenter les fonds, on ne doit représenter que les produits.

Voilà ce qui nous arrive. Le luxe est aboli ; tous les métaux achetés chèrement, ou tirés des retraites où le faste les retenait, ont été convertis en signes. Il ne reste plus de métaux ni de luxe pour l’industrie : voilà le signe doublé de moitié, et le commerce diminué de moitié. Si cela continue, le signe enfin sera sans valeur, notre change sera bouleversé, notre industrie tarie, nos ressources épuisées ; il ne nous restera plus que la terre à partager et à dévorer.

Lorsque je me promène au milieu de cette grande ville, je gémis sur les maux qui l’attendent, et qui attendent toutes les villes, si nous ne prévenons la ruine totale de nos finances. Notre liberté aura passé comme un orage, et son triomphe comme un coup de tonnerre. Je ne parlerai pas de l’approvisionnement de Paris ; c’est une affaire de police qui ne regarde pas l’économie.

Nos subsistances ont disparu à mesure que notre liberté s’est étendue, parce que nous ne sommes guère attachés qu’aux principes de la liberté, et que nous avons négligé ceux du gouvernement.

Il était dans la nature des choses que nous nous élevassions promptement au degré d’énergie où nous sommes parvenus. Nos besoins pressants ont dévoré tous nos préjugés ; notre liberté est fille de la misère. Il n’est plus temps de se flatter ; il ne faut pas non plus tomber dans le découragement. Établissons notre république, don-