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le faible et l’innocent contre l’abus des lois.

Le ministère public poursuivit autrefois d’office les délits ; quel que fût l’avantage de cette institution, elle était tyrannique. Les lois épouvantaient les hommes, et le gouvernement se montrait partout leur ennemi terrible.

Dans un gouvernement sévère, les lois sont violées par le magistrat ; dans un gouvernement faible, elles le sont par le peuple. Quand les lois règnent seules avec vigueur, le gouvernement n’est ni faible ni sévère.

CHAPITRE VIII.

DE LA SOCIÉTÉ ET DES LOIS

Les lois ne sont point des conventions, la société en est une : les lois sont les rapports possibles de la nature de cette convention : ainsi celui qui commet un crime n’offense point la société, elle n’est qu’une réunion d’individus qui n’ont aucun droit sur la liberté et la vie du coupable, lequel n’est point lié par une simple convention ; mais il offense les lois en altérant le contrat.

Je veux dire que la société, dont la modération et la douceur sont l’âme, ne peut être juge des délits, car alors elle serait une tyrannie et les lois ses bourreaux.

Ainsi là où les crimes sont traduits à la société, les peines doivent être effroyables pour que chaque individu soit vengé et soit effrayé : là où les crimes sont traduits aux lois, la société demeure paisible, et la loi impassible confond ou pardonne.

CHAPITRE IX.

DE LA FORCE RÉPRESSIVE CIVILE

Malheur au gouvernement qui se défie des hommes ; j’ai l’âme affligée lorsqu’un satellite passe et me considère : ô ciel, ô nature, s’écrie mon cœur, qui donc a pu m’asservir de la sorte, et pourquoi le soupçon m’accompagne-t-il pas à pas ? Peuple vertueux et digne de la liberté, rompez toute force particulière qui est une indépendance