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la contemplèrent un jour en ont gardé dans les yeux et dans le cœur un éblouissement impérissable. Barère lui-même, le triste Barère, qui fut un des ouvriers les plus actifs du 9 thermidor, sentait, dans sa vieillesse, peser sur lui les ombres des justes. Il sanglotait en songeant à la mort de Robespierre, et il écrivait sur Saint-Just ces lignes qui sont la glorification de la victime et la condamnation des assassins :

« S’il eût vécu dans le temps des Républiques grecques, il aurait été Spartiate. Ses Fragments prouvent qu’il aurait choisi les institutions de Lycurgue ; il a eu le sort d’Agis et de Cléomène . « S’il fut né Romain, il eût fait des révolutions comme Marius, mais n’aurait jamais opprimé comme Sylla. Il exécrait la noblesse autant qu’il aimait le peuple.

« Sa manière de l’aimer ne convenait sans doute ni à son pays, ni à son siècle, ni à ses contemporains, puisqu’il a péri ; mais du moins il a laissé en France et au xviiie siècle une forte trace de talent, de caractère et de républicanisme.

« Son style était laconique, son caractère était austère ; ses mœurs politiques sévères : quel succès pouvait-il espérer ?

« Ce qui distingue l’esprit de Saint-Just est l’audace. C’est lui qui a dit le premier que le secret de la Révolution est dans le mot osez ; et il a osé

« C’est lui qui a dit que repos des révolutionnaires est dans la tombe, et il y est descendu à vingt-sept ans.