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CHAPITRE II

DES PRINCIPES DE LA CONSTITUTION FRANÇAISE

Les anciens législateurs avaient tout fait pour la république, la France a tout fait pour l’homme.

La politique ancienne voulait que la fortune de l’État retournât aux particuliers, la politique moderne veut que le bonheur des particuliers retourne à l’État. La première rapportait tout à la conquête, parce que l’État était petit, entouré de puissances, et que de son destin dépendait le destin des individus ; la seconde ne tend qu’à la conservation, parce que l’État est vaste, et que du destin des individus dépend le destin de l’empire.

Plus les républiques ont un territoire étroit, plus les lois doivent être sévères, parce que les périls sont plus fréquents, les mœurs plus ardentes, et qu’un seul peut entraîner tout le monde. Plus la république est étendue, plus les lois doivent être douces, parce que les périls sont rares, les mœurs calmes, et que tout le monde se porterait vers un seul.

Les rois ne purent tenir contre la sévérité des lois de Rome naissante ; cette sévérité, quoique excessivement émoussée, rétablit les rois dans Rome agrandie.

Les droits de l’homme auraient perdu Athènes ou Lacédémone ; là, on ne connaissait que sa chère patrie, on s’oubliait soi-même pour elle. Les droits de l’homme affermissent la France ; ici la patrie s’oublie pour ses enfants.

Les vieux républicains se dévouaient aux fatigues, au carnage, à l’exil, à la mort, pour l’honneur de la patrie ; ici la patrie renonce à la gloire pour le repos de ses enfants, et ne leur demande que la conservation.

CHAPITRE III

DU RAPPORT DE LA NATURE ET DES PRINCIPES DE LA CONSTITUTION

Si la démocratie de France ressemblait à celle que les Anglais tâchèrent d’établir vainement, parce que le peuple n’était