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confiance. Sa première proclamation débute ainsi : « Nous arrivons et nous jurons, au nom de l’armée, que l’ennemi sera vaincu… » Et il lui suffit d’avoir voulu en quelques jours, l’immense corps décomposé ressuscite, revit, devient invincible. Lui, inébranlable, poursuit son œuvre. Il se mêle à la bataille « Ceint de l’écharpe du représentant, il charge à la tête des escadrons républicains, et se jette dans la mêlée, au milieu de la mitraille et de l’arme blanche, avec l’insouciance et la fougue d’un jeune hussard[1]. » À Landau, il est à la tête d’une colonne chargée d’enlever une redoute, et, après l’action, les grenadiers lui disent : « Nous sommes contents de toi, citoyen représentant ; ton plumet n’a pas remué un seul brin, nous avions l’œil sur toi ; tu es un bon b…[2] » Cet héroïsme n’a rien de tumultueux, rien d’affecté. Il n’est que la conséquence de cette idée très simple que la volonté peut tout dompter. « Quand Saint-Just et moi, explique Baudot, nous mettions le feu aux batteries de Wissembourg, on nous en savait beaucoup de gré ; eh bien, nous n’y avions aucun mérite ; nous savions parfaitement que les boulets ne pouvaient rien sur nous. » De Saint-Just plus que de tout autre, on peut dire qu’il commanda à la victoire. Ici, ce n’est plus une image des ordres précis décrétèrent et forcèrent la victoire. On ne sait plus si l’on vit dans l’histoire ou dans l’irréel. Que pourrait-il encore envier aux dieux, ce calme jeune homme, sublime

  1. Lamartine, Histoire des Girondins, VII, p. 341.
  2. Histoire de France, par l’abbé de Montgaillard, t. IV, p. 100.