Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/25

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était permis d’être impunément vertueux. Je te suivrai au sortir de l’enfance, dans ces méditations profondes qui t’occupaient tout entier sur la science du gouvernement, les droits des peuples, et dans ces élans sublimes de l’horreur de la tyrannie qui dévorait ton âme et l’embrasait d’un enthousiasme plus qu’humain. Je dirai quel était ton zèle à défendre les opprimés et les malheureux, quand tu faisais à pied, dans les saisons les plus rigoureuses, des marches pénibles et forcées, pour aller leur prodiguer tes soins, ton éloquence, ta fortune et ta vie. Je dirai quelles furent tes mœurs austères, et je révélerai les secrets de ta conduite privée, en laissant à l’histoire à faire connaître la conduite publique et tes actions dans le gouvernement, les discours comme législateur, et tes missions immortelles près de nos armées.

« Ô journée de Fleurus ! tu dois associer tes lauriers, que rien ne pourra flétrir, aux funèbres cyprès qui ombragent la tombe de mon ami. Et vous, Pichegru, Jourdan, les compagnons de ses exploits et de sa gloire, vous lui rendrez justice. Vous êtes guerriers, vous devez être francs. La bonne foi fut de tout temps la vertu des héros. Vous direz ce que doit la patrie à ses vertus et à son courage. Vous ne trahirez point la vérité, vous ne servirez point l’envie ; car, un jour, vous seriez victimes du forfait dont vous auriez été complices. Vous direz ce qu’il a fait contre les traîtres, et comment il a déployé avec une sévérité nécessaire l’autorité nationale ; comment il a donné l’exemple de la frugalité et de la bravoure