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Vers l’aiguillette atteint par Ferragon.
L’air retentit, embrasé d’étincelles.
Les deux premiers, raffermis sur leurs selles,
Avec sang-froid tirent leurs coutelas,
Et vigoureux, précipitent leurs bras.
Pépin frémit : son terrible adversaire
Vous le rossait de son lourd cimeterre.
Avec fureur les deux autres guerriers
Entrechoquaient leurs glaives meurtriers.
Las de combattre, ils firent une pause.
La tête haute et la visière close,
Ils s’observaient d’un œil étincelant.
Et s’exerçaient à frapper sûrement.
Bientôt, après ce farouche silence,
Plus furieux, l’un et l’autre s’élance ;
L’airain en feu sous les coups retentit ;
Leur bras s’évite, et se trompe, et se fuit.
L’œil étonné, de leur fer homicide
Laisse échapper le mouvement rapide,
Qui, dans l’ardeur de ce mobile jeu,
Trace dans l’air mille cercles de feu.
Déjà le sang inondait leurs armures,
Quand tout à coup l’un et l’autre coursier,
Rendus fougueux par de larges blessures,
Par les éclairs et le bruit de l’acier,
Gagne la plaine, ne veut reconnaître
Ni l’éperon, ni la voix de son maître.
Les Spadassins, en efforts superflus,
Pressent des flancs qui n’obéissent plus.
Impatiens, de la selle ils sautèrent.
Et, plus hardis, à la charge volèrent.
Chaque parti voyait avec frayeur
L’acharnement de ces fous pleins d’honneur,
Qui, rejetant l’artifice et la ruse,
Faible avantage où leur bras se refuse,
Ne paraient plus, semblaient jouer la mort,
Et n’écoutaient que leur fougueux transport.
Le Ferragon voit, dans sa main trompée,