Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/23

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mains sûres. Elles vengeront mon ami, elles me vengeront moi-même, elles vous accuseront dans l’avenir, et vous serez flétris, et je serai estimé.

« Trop obscur pour m’enorgueillir de moi, je paraîtrai avec gloire à côté de celui dont j’aurai défendu l’innocence, et que j’aurai avoué pour mon ami, quand tout l’abandonnait sur la terre. Ces lignes, je vous les adresse à vous-mêmes, tyrans. Je veux que vous les connaissiez et qu’elles fassent votre supplice, car vous frémirez de rage en les lisant, et le courage et la vertu d’un homme libre feront pâlir les oppresseurs de mon pays.

« La Révolution, qui marche avec des pieds de feu, vous atteindra dans sa course dévorante, et vous serez frappés comme ceux dont vous insultez aujourd’hui les cadavres. Mais ils seront absous au tribunal des siècles ; ils triompheront dans la postérité, tandis que vous serez ignominieusement traînés à la voirie.

« Oui, je rougis d’être membre d’une cité qui souffre un gouvernement tel que le vôtre, en divorce avec la justice, la vertu et la nature. Mais je me glorifie d’être dans vos bastilles et de grosssir le nombre de vos victimes.

« Qui êtes-vous, vous qui déclarez la guerre à l’amitié, qui érigez en crime les affections les plus légitimes et les passions les plus généreuses ? Ah ! tous les hommes de bien qui n’ont pas de poignards à opposer à vos forfaits, doivent périr, plutôt que d’avoir les yeux souillés par votre insolent triomphe, et vous dire comme Thraséas à Néron : Puisque la