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Ces Conquérans, sous les noms imposteurs
De liberté, de soutiens, de vengeurs,
À l'œil surpris découvriraient peut-être
Un scélérat, honteux de le paraitre;
Ces Moines saints, les yeux en Paradis,
Décèleraient sous la haire souillée,
Un coeur brûlé de la soif des Houris,
Une âme sèche, à l'intrigue pliée,
Et l'Avarice, en Lazare habillée;
L'homme puissant, dans son humilité.
Le vil ragoût d'une lâche fierté;
Dans l'amitié, l'on verrait l'espérance ;
Et dans l'amour, non le tribut du cœur,
Mais le fardeau de son indifférence ;
Parfois dans l'un un grain de suffisance,
Parfois dans l'autre une jalouse humeur.
Homère a beau nous peindre dans Achille.
D'un bras fougueux le courage indompté,
Il était homme et fut resté tranquille,
Sans l'aiguillon d'un peu de vanité,
Sans Briséis et la nécessité.
Ainsi Pépin, dont la haute vaillance
Chancelait même à l'aspect d'une lance,
Devant les gens, au gré de sa valeur,
Du temps rapide accusait la lenteur.
Enfin la nuit, peut-être sa dernière,
Quitte les cieux parsemés de lumière.
Vénus fuyait; l'aube, d'un pied vermeil.
Traçait la route aux coursiers du soleil,
Et du tribut de ses perles humides.
Désaltérait les campagnes arides.
Jà les Zéphirs sur les fleurs se jouaient,
Jà les oiseaux par les airs voltigeaient.
Guillot, au son de sa flûte enjouée,
Dans les vallons ses chèvres ramenait,
Et le clairon de sa voix enrouée
Aux champs de Mars les Guerriers appelait.
Pàle et tremblant, Pépin se claquemure