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« De Forgeron du céleste tonnerre.
Vulcain alors jette un profond soupir.
« Il s’en faut bien que l’emploi soit le même,
Ajouta-t-il, « je n’ai plus de loisir ;
« Le nouveau Dieu tonne pour son plaisir.
« Mes compagnons et ceux de Poliphême
« À ses ébats ne peuvent plus suffir.
« Je partageais autrefois l’ambroisie,
« Et savourais voluptueusement
« Le doux nectar dans la coupe de vie.
« Aréthuse est mon nectar à présent.
« J’allais le soir sous les plaines liquides,
« M’ébattre au sein de fraiches Néréides.
« Mais aujourd’hui, l’Océan malheureux
« N’est plus peuplé que de monstres affreux.
« Dans ces forêts je suivais les Driades ;
« Sur ces coteaux j’allais voir les Menades ;
« J’allais trouver mon épouse à Paphos. »
Le Dieu boiteux devint rouge à ces mots,
Et de son cœur réveillant l’amertume,
Il appela ses compagnons grillés,
Qui l’écoutaient sur leur masse appuyés,
Et déchargea son dépit sur l’enclume.
« C’est grand’pitié qu’on ait ainsi chassé,
Disait Organt, « ces Dieux du temps passé !
« Valaient-ils pas ce que valent les nôtres ?
« Ce Dieu fameux, qui, le tyrse à la main,
« Endoctrina si bien le genre humain,
« Valait-il pas nos rechignés Apôtres ?
« Oh ! si jamais j’en avais le pouvoir,
« J’aurais bientôt l’antiquité vengée,
« Et balayé le divin Apogée,
« D’Anges, de Saints à froc ou blanc ou noir. »
Un tel propos était peu catholique,
Et ne l’était mêmes aucunement ;
Mais vous saurez, et ceci vous l’indique,
Que mon Gaulois n’était qu’un mécréant :
Aussi le drôle, et ma foi le déclare,