Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/214

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Qu’il baptisa du vilain nom de Diables ;
« Il les chargea de griller tout chacun
« Qui soutiendrait que trois ne font pas un,
« Et prétendrait, dans sa folie extrême,
« Que l’on ne peut, si malin que l’on soit,
« Ouvrir la bouche et s’avaler soi-même ;
« Prodige heureux que la raison conçoit.
« La terre fut à l’instant empàtée
« Des Dieux payens que l’Érèbe vomit,
« Et, comme au temps du pauvre Épiméthée,
« Des maux humains la boîte se rouvrit ;
« L’Enfer béant vomit les Euménides,
« La terre but leurs poisons homicides,
« Et, malheureux sous un sceptre de fer,
« Le genre humain regretta Jupiter.
« Le Fanatisme, à l’ail ardent et louche,
« L’Enfer dans l’âme et le Ciel dans la bouche,
« La Cruauté, son Ministre sanglant,
« Et plus souvent son coupable adversaire ;
« Le Désespoir, son criminel enfant,
« Bientôt après inondèrent la terre.
« On mit Plutus à la porte des cieux ;
« L’homme avili renta ses nouveaux Dieux ;
« Pluton se fit eunuque, afin de vivre ;
« Mourant de faim. Apollon fit un livre ;
« Pallas s’en fut, l’Honneur voulut la suivre :
« Pour l’Intérêt, il prit un capuchon.
« Ce Dieu d’Enfer changea son premier nom
« En ceux de Luc, de Grégoire et d’Antoine ;
« L’Hypocrisie, en changeant de maison,
« Mena Priape, et voulut qu’il fût Moine.
« Ma Cythérée emmena Cupidon.
« De Tysiphone et ses sœurs turbulentes,
« Nécessité fit un trio nonnain,
« Et des Laïs, de nos Parques trop lentes.
« Le nouveau Dieu vit que le genre humain
« Ne serait pas meilleur qu’à l’ordinaire,
« Et me laissa l’antique ministère