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« Être cocu, Dieu me garde du tour ! »
Leur voix sonore, au ton mâle aguerrie,
Avec éclat soutenait la partie ;
En roulemens tantôt se prolongeait,
À flots pressés puis se précipitait,
Et de ces mots, dont Vert-Vert hérétique
Vint effrayer nos Sœurs de Nivernais,
À son retour des rivages Nantais,
Faisait sonner la rudesse énergique.
L’Ange gardien alors parut en l’air
Sur un char blanc, attelé d’un éclair.
Il descendit, et le filleul Antoine,
À son aspect, parut sot comme un Moine.
« Mon cher Gardien, dit-il baissant les yeux,
« Point ne croyais vous trouver en ces lieux. »
L’Ange repart : « L’armée est dans la lune ;
« Érâtre-Hirem s’avance vers le Rhin ;
« Organt s’amuse, et caresse une brune !
« C’est donc ainsi que vous cherchez Turpin !
« Tout le pays est resté sans défense ;
« Les ennemis vont inonder la France ;
« Laissez Perrette, et sautez sur mon char. »
Antoine Organt avec son Ange part.
Du haut du ciel, il voit Perrette à terre,
Et s’écriait : Ô malheureuse guerre !
L’Ange, en volant, ce discours lui tenait :
« Mon filleul cher, je plains votre patrie
« De tout mon cœur, et j’ai l’âme marrie
« De voir Charlot insensé comme il est.
« Par des tyrans la France est gouvernée ;
« L’État faiblit, et les lois sans vigueur
« Respectent l’or du coupable en faveur.
« Dans ses écarts la Reine forcenée
« Foule, mon fils, d’un pied indifférent,
« Et la Nature, et tout le peuple franc.
« Son avarice, et cruelle et prodigue,
« Pour amasser, par-tout cabale, intrigue.
« Dissipe ensuite, et, sans s’embarrasser.