« Assurément c’est une courtoisie
« Dont sa bonté seule nous gratifie ;
« Puis pensez donc quel honneur ce serait,
« Si, par hasard, pour lui l’on vous prenait.
« Un tel discours fit rompre la sentence.
« Sire Arimbaud, bête comme un oison,
« N’avait pas fait cette réflexion.
« Il se reproche une telle démence,
« Dont ses vassaux se seraient pavannés,
« Et pense bien, avec ferme assurance.
« Nous faire peine en nous laissant le nez. »
Un tel récit agaça le courage
D’Antoine Organt ; il jura les beaux yeux
Qu’il adorait, de purger ce rivage
D’un scélérat qui vantait ses aïeux.
Ils avançaient devers une rivière ;
Le Meûnier dit : Il nous faut passer l’eau ;
Puis sa voix dure appelle le bateau.
Une gentille et fraîche Batelière
Arrive tôt, lève l’ancre en chantant,
Et l’aviron fend le moite élément.
Le vent soufflait, et la jupe imprudente
Servait de voile à la barque inconstante.
Perrette n’a le temps d’apercevoir
Que le Zéphyr joue avec son mouchoir ;
Elle dépêche, et ses mains empressées
Font écumer les vagues repoussées.
Tout chez Perrette était en mouvement,
Jupe, cheveux, où Zéphyre folâtre ;
Mais le teton, ferme et blanc comme albâtre,
Reste immobile, et grossit seulement
Par cette épreuve, où Perrette essoufflée
Met sa vigueur ailleurs mieux employée ;
À l’autre bord, son époux indiscret,
Nos passagers d’un œil rond observait.
Et cependant Perrette arrive à terre.
Çà, respirons, la gente Batelière,
Dit le Meûnier, homme rempli de soins ;
Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/203
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.