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« Disait Nemours ; eh bien, êtes-vous fous ? »
En le voyant, chacun se prit à rire,
Et dit : « Vous-même êtes-vous fou, beau sire ? »
À chaque instant, plus on allait buvant,
Et plus la troupe allait se grossissant.
L’Évêque Ebbo, qui buvait plus qu’un autre,
De Diabloteaux un essaim avala ;
De juremens lardant sa patenôtre.
Devers Nemours le hasard le traîna.
À chaque pas, le gros Prélat s’écroule,
Sa mitre on voit dans la poudre qui roule.
Le vieux Nemours de honte recula.
Quoi, lui dit-il, quoi, Prélat. quoi, vous-même !
L’Evêque Ebbo, par un B… riposta.
Troussa sa robe, et son cu lui montra.
Ô profondeur ! ô sagesse suprême !…
Nemours alors comprit tout le problème,
Apercevant un certain écriteau
Mis par le Ciel au derrière d’Ebbo.
« Eh quoi ! dit-il, d’une voix animée,
« Alerte ! un Prêtre, et tous nos bénitiers ;
« L’Esprit malin possède notre armée ! ».
On cherche en vain. Tondus, Clercs, Aumôniers,
Tous avaient bu. Le Général dit : Vite,
Que l’on m’apporte au moins de l’eau bénite.
À ce grand mot, sinistre à nos pervers,
Tous par la main, en forme de guirlande,
Incontinent s’envolent par les airs.
Nemours confus voit l’infernale bande
Devers le Ciel s’enfuir en le bernant,
Et dans l’éther disparaître à l’instant.
Un tel récit est assez surprenant ;
Mais on ne peut le révoquer en doute.
Mathieu Pâris, Auteur fort important,
Mérite bien que croyance on ajoute
À ce qu’il dit, sur-tout si gravement.
Le Satanas, en esprit cault et sage,
Pour profiter d’un si rare avantage,