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Frêles vapeurs au chaos amassées,
Et dans les airs d’elles-mêmes lancées.
Rien n’existait avant ce changement.
Les élémens, engeance mutinée,
Se disputaient l’empire du néant ;
Si que la vie, à la mort condamnée,
Dans le tombeau gissait obscurément.
L’air une fois, dans ce bouillonnement,
Ayant rompu la voûte de l’abîme,
Du vide noir escalada la cîme,
Bouleversa l’empire du chaos,
Jusques au ciel en fit voler les flots,
Des élémens redoubla la furie,
Confondit tout, et la mort et la vie,
Et ne cessa cet horrible ouragan,
Qu’après avoir, dans sa course rapide,
Épars au loin ses forces dans le vide ;
Lors il cessa de régner en tyran.
Trois élémens, le feu, l’onde et la terre,
Restaient encore à se faire la guerre ;
Bientôt le feu, plus vif et plus léger,
En tourbillons vint à se dégager.
Je te salue, ô merveille éthérée,
Brillant soleil ! ce fut toi le premier,
Qui, triomphant de la masse incréée,
Vins imprimer la lumière épurée,
Au sein des airs où l’on te voit briller.
Mille soleils tour à tour s’échappèrent,
Et dans le ciel au hasard se placèrent.
Jaillis du sein des élémens calmés,
Ces corps, selon leur poids et leur essence,
Se sont fixés à diverse distance,
Plus ou moins haut dans l’espace entraînés,
D’une manière ou plus lente ou plus vive,
Par une essence ou plus ou moins active.
Les vastes cieux en furent éclairés.
Tous, en effet, d’une homogène essence,
Ils font effort, l’un par l’autre attirés,