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De son beau sein agitait le contour.
Organt ne put contenir dans son âme
Les mouvemens de son ardente flamme ;
Il descendit pour voler sur son sein :
Tout s’éclipsa ; tout disparut soudain.
L’Âne, entonnant son hymne meurtrière.
Fut essuyer les quolibets des Dieux,
Et le Héros, la tête la première,
Roula des airs pendant un jour ou deux.
Il eût péri sans Monsieur son bon Ange,
Qui, sans rancune, en ses bras le retint,
Et l’apporta sur les rives du Rhin,
Tout étourdi de cette chûte étrange.
Les ennemis avaient quitté leur camp ;
Ils s’avançaient sur un front menaçant,
Pour présenter bataille au Roi de France,
Et cependant les Chefs, en son absence,
Plus fous que grands, plus vains qu’audacieux,
Dans une ardente et confuse assemblée,
Se disputaient ce poste glorieux.
S’il n’eût été frappé dans la mêlée
D’une terreur dont son âme est troublée,
Par droit d’orgueil, de valeur, et de sang,
Pépin lui seul prétendrait à ce rang ;
Mais sa frayeur, encor toute récente,
Le retenait prisonnier dans sa tente :
Les ennemis avançaient cependant.
Henri de Nel jurait sur son épée ;
Montmorency sa Maîtresse et son Dieu ;
Et Châtillon, son Patron Saint-Mathieu,
Que leur valeur ne serait pas trompée.
Le vieux Nemours alors lève la voix :
Nemours était le Nestor de la France ;
Il en avait et l’âge et l’éloquence,
Et, comme lui, sa valeur autrefois
Avait brillé par d’illustres exploits.
On respectait son antique vaillance.
Chacun se tait ; on l’écoute, il commence :