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Et sous les eaux chasser les Néréïdes :
Ainsi devant Charlot et ses Picards,
Les ennemis fuyaient de toutes parts.
Organt, en proie aux vapeurs de Morphée,
Croyait aussi lutter dans la mêlée.
Heureux sommeil, dans tes bras séducteurs,
Présente-moi de plus douces erreurs !
Transporte-moi dans ces lieux enchanteurs,
Où les Amours veillent près d’Émilie,
Sur le duvet mollement assoupie.
Là, sur la foi des ombres de la nuit
(Ô songe heureux, que n’es-tu véritable !),
Montre-la moi dans un désordre aimable,
Un bras, un sein, une fesse hors du lit ;
Que je l’entende, en une erreur pareille,
Me confesser quelque tendre secret,
Et que le bruit d’un baiser indiscret,
Entre mes bras en sursaut la réveille.
Le sang coulait sur les rives du Rhin,
Organt voyait l’agile Renommée
Courir les rangs, un laurier à la main,
Et les Guerriers de l’une et l’autre armée,
Avec chaleur balancer le destin.
Alors Pépin, frère du Roi de France,
Tombe mourant à l’aspect d’une lance.
À ce malheur, Organt, saisi d’effroi,
Courut venger le frère de son Roi ;
Car il dormait, et ne soupçonnait guère
Être si loin du monde sublunaire.
On écoutait alors un madrigal ;
Le Paladin, en style fort brutal,
Change la scène, et fond sur l’Auditoire :
Vite on détale, et tous les beaux Esprits
Fuyaient chantant sur le ton de Piis.
Organt s’éveille, et rougit de sa gloire.
Heureusement son âne il retrouva,
Monta dessus, et dans l’air s’éleva ;
Bientôt après son procès s’informa.