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Organt disait : nous en ferions autant.
Bien qu’en ces lieux l’homme fùt bête vile,
On ne fut pas de l’y voir bien surpris.
Ce n’étoit pas chose plus incivile
Que voir un âne en tribune à Paris.
On ne dit rien ; on crut, à sa figure,
Que de son âne il était la monture :
On le voyait marcher à ses côtés.
On adorait dans l’Asinomaïe,
Comme ici bas, Melpomène et Thalie :
Non toutefois ces deux Divinités,
Mères de l’Art, filles de la Nature,
Rouges sans fard, et belles sans parure,
Telles qu’enfin les a représentés
La vertueuse et simple Antiquité.
Melpomène, en âne travestie,
Braille en vers froids la morale bouffie,
Et grimaçant pour amuser les sots,
En vieux Rheteurs habille les Héros ;
Prône le M……, et rit du vieux Corneille,
Siffle Dorfeuille[1], et caresse S… F…,
Pour avoir fait de Pyrrhus un brutal,
Et d’Apollon épouvanté l’oreille.
Antoine Organt, simple comme un Gaulois,
Dit, en voyant ces Grecs Groënlandois :
C’est donc ainsi qu’on parlait autrefois ?
Il voit Thalie en cotillon mesquin,
Pour des sabots laissant le brodequin,
Froidement gaie, et grotesquement tendre,
Dédaigner l’art et le sel de Ménandre.
Organt vit là M……, dont le talent
Est d’écorcher Molière impunément,
Et Des……, le Sancho de l’école,
Qui croit l’Olympe assis sur son épaule ;

  1. Dorfeuille, Acteur sublime, plein de naturel, et par conséquent repoussé par les Comédiens francais, en dépit du Public même, qui l’a redemandé quatre fois.