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De temps en temps, le long des vastes plaines :
Mon cher Organt ! Organt elle criait ;
Et l’écho seul, sur les cimes lointaines,
Plaintivement Organt lui répondait.
Ses bras mignons au Ciel elle tendait,
Et ses beaux yeux, pleins d’inutiles charmes,
Et qui fondaient en inutiles larmes.
Il était nuit ; où giter cependant ?
À qui s’offrir ? Car elle avait grand’peine
À se montrer sous le noir vêtement.
Tandis qu’ainsi, malheureuse, incertaine,
Elle flottait entre mille projets,
Nés l’un de l’autre, un par l’autre défaits,
Elle entendit le son d’une musette,
Qui s’élevait du milieu des forêts ;
Pour l’écouter, Nice, en pleurant, s’arrête.
« Il est sans doute heureux, dit-elle, hélas !
« Celui qui chante, et que j’entends là-bas » !
Nice, à ces mots, éplorée et tremblante,
Devers ces lieux où le berger chantait,
Hâtait au trot sa monture indolente.
On aurait dit que le drôle en effet
Prenait plaisir au pied qui le frappait.
Pour comble enfin, comme Nicette avance,
Notre Berger sa musette laissant,
Fit place au loin au plus morne silence.
Près d’un ruisseau, Nicette, en cheminant,
Vit un vieillard endormi sous un plane ;
Elle descend, timide, de son âne,
Accourt, s’approche, et croit voir un pasteur ;
Mais elle voit Ydrahaut, l’Enchanteur,
Qui, pour voler librement dans l’espace,
Avait laissé son corps en cette place.
Ses vêtemens étaient blancs, et de lin ;
Sa barbe antique, artistement bouclée,
À flots d’argent descendait sur son sein ;
Une ceinture étroite et constellée,
Autour de lui tenait dans son repos