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Puisqu’il a su plaire,
Faut-il en bon père
Ici consentir ?
Mais pourtant j’enrage,
Car c’est grand dommage
De l’unir avec
Un pareil blanc-bec !
Tonio.
Eh bien ?
Chœur.
Eh bien ? Si tu dis vrai, son père, en ce moment,
(Avec solennité.)
Te promet son consentement…
Tonio, avec transport.
Pour mon âme
Quel destin !
J’ai sa flamme,
J’ai sa main !
Jour prospère !
Me voici
Militaire
Et mari !
ENSEMBLE.
Chœur.
Puisqu’il a su plaire,
Il faut en bon père
Ici consentir, etc.
Tonio
Pour mon âme
Quel destin !
J’ai sa flamme, etc.

Scène XII.

Les Mêmes, Sulpice et Marie, sortant de la chaumière.
Tonio, à Sulpice.
Elle est à moi !… son père me la donne !…
Sulpice, avec humeur.
Elle ne peut être à personne !
Qu’à sa tante, qui va l’emmener de ces lieux !
Chœur.
Emmener notre enfant ! que dit-il donc, grands dieux !
Tonio.
L’emmener loin de moi !… mais c’est un rêve affreux !
Marie, se rapprochant des soldats.
romance
PREMIER COUPLET.
Il faut partir !
Il faut, mes bons compagnons d’armes,
Désormais, loin de vous m’enfuir !
Mais par pitié cachez-moi bien vos larmes,
Vos regrets pour mon cœur, hélas ! ont trop de charmes !
Il faut partir !
DEUXIÈME COUPLET.
Il faut partir !
Adieu ! vous que, dès mon enfance,
Sans peine, j’appris à chérir,
Vous, dont j’ai partagé les plaisirs, la souffrance,
Au lieu d’un vrai bonheur, on m’offre l’opulence,
Il faut partir !
Tonio, à Marie.
Eh bien ! si vous partez, je vous suis…
Sulpice.
Eh bien ! si vous partez, je vous suis… Non, vraiment !
N’es-tu pas engagé !…
Marie.
N’es-tu pas engagé !… Tonio !
Tonio.
N’es-tu pas engagé !… Tonio ! Chère Marie !
Marie.
Ce coup manquait à mon tourment…
Le perdre !… quand à lui je pouvais être unie !
Chœur.
Ô douleur ! ô surprise !
Elle quitte ces lieux !…
Au diable ! la marquise
Qui l’enlève à nos vœux !
Aux combats, à la guerre,
Près de nous, cette enfant
Est l’ange tutélaire
De notre régiment !
Tonio et Marie, à part.
Plus d’avenir ! plus d’espérance !
Mon bonheur n’a duré qu’un jour !
Que faire, hélas ! de l’existence,
Quand on perd son unique amour !

Scène XIII.

Les Mêmes, La Marquise, sortant de la chaumière.
La Marquise, à Marie.
Suis-moi ! suis-moi… quittons ces lieux !
Marie, aux soldats.
Mes chers amis, recevez mes adieux !
Ta main, Pierre !… Jacques, la tienne !
Et toi, mon vieux Thomas !
Et toi, mon brave Étienne
Qui tout enfant, me portais dans tes bras…
Embrasse-moi, Sulpice !
La Marquise, avec indignation.
Ah ! quelle horreur, ma nièce !
Marie.
Ils ont pris soin de ma jeunesse…
De ces braves je suis l’enfant !
Chœur.
C’est la fille du régiment !
Sulpice, aux soldats.
Allons, enfants, assez de larmes !…
Pour votre fille portez armes !
Et puis, en route, à la grâce de Dieu !
Marie, entraînée par la Marquise.
Adieu ! adieu ! adieu ! adieu !
Chœur.
Adieu ! adieu !
Tonio.
Adieu, chère Marie !… adieu !

Les tambours battent aux champs. — Les soldats présentent les armes à Marie, commandés par Sulpice qui s’essuie les yeux. — Marie, au fond du théâtre, leur fait un signe d’adieu, en pleurant, tandis que Tonio, sur le devant de la scène, rejette sa cocarde et la foule aux pieds avec désespoir. — Tableau.