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xl, 8.) » Je crois qu’on ne peut douter que le fruit soit ce Verbe de Dieu ; car le Verbe est le Christ même.

4. Ainsi le bon fruit c’est le Christ qui demeure éternellement : mais où est l’herbe qui se dessèche, où est la fleur qui tombe ? Le Prophète va nous répondre : « Toute chair n’est que de l’herbe et toute sa gloire est comme la fleur des champs (Isa., xl, 6). » Si toute chair n’est que de l’herbe, il s’ensuit que le peuple charnel des Juifs a dû se dessécher comme la fleur des champs. N’en est-il pas en effet ainsi ? N’est-il pas privé de toute la graisse de l’esprit, maintenant qu’il s’en tient à la sécheresse de la lettre ? Et sa fleur n’est-elle point tombée, quand a disparu la gloire qu’il trouvait dans sa Loi ? Si elle n’est point tombée où donc sont ce royaume, ce sacerdoce, ces prophètes, ce temple et toutes ces merveilles enfin dont il aimait à se glorifier en disant : « Quelles grandes choses nous avons entendues et connues et que nos Pères nous ont racontées (Psalm., lxxvii, 3) ? » Et ailleurs : « Quelles merveilles n’a-t-il point ordonné à nos Pères de faire connaître à leurs enfants (Ibidem, 7) ? » Telles sont les réflexions que me suggèrent ces paroles : « À Nazareth, ville de Galilée. »

À qui l’ange Gabriel est envoyé.5. C’est donc dans la ville de Nazareth que l’ange Gabriel fut envoyé de Dieu, mais à qui fut-il envoyé ? « À une Vierge qui avait été fiancée à un homme nommé Joseph. » Quelle est cette Vierge si vénérable qu’elle mérite d’être saluée par un ange ? et si humble qu’elle ait un artisan pour époux ? Belle alliance de la virginité et de l’humilité.Quelle belle alliance que celle de l’humilité avec la la virginité. L’âme, où l’humilité fait valoir la virginité et dans laquelle la virginité jette un nouveau lustre sur l’humilité, plaît singulièrement à Dieu. Mais de quels respects ne vous semblera point digne celle en qui la fécondité exalte l’humilité, et la maternité consacre la virginité ? Vous l’entendez, une vierge est une vierge humble ; si donc vous ne pouvez imiter la virginité de cette humble vierge, imitez du moins son humilité. Sa virginité est digne de toutes louanges, mais l’humilité est bien plus nécessaire que la virginité ; si l’une est conseillée, l’autre est prescrite, et si on vous invite à garder l’une, on vous fait un devoir de pratiquer l’autre. En parlant de la virginité, il est dit seulement : « Que ceux qui peuvent y atteindre, y atteignent (Matth., xix, 12). » Mais pour ce qui est de l’humilité, voici en quels termes il en est parlé : « Si vous ne devenez comme de petits enfants, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux (Matth., xviii, 3).» Ainsi l’une est l’objet d’une récompense et l’autre d’un précepte. On peut se sauver sans L’humilité est nécessaire au salut, il n’en est pas de même de la virginité.la virginité, on ne le saurait sans l’humilité. En un mot l’humilité qui gémit sur la perte de la virginité peut plaire encore à Dieu, mais sans l’humilité le dirai-je ? la virginité même de Marie ne lui eût point été agréable. En effet, « sur qui jetterai-je les yeux, dit-il, sur qui mon esprit aimera-t-il à se reposer, sinon, sur l’homme humble et pacifique, (Isa., ult., 2) ? Sur l’homme humble, » dit-il, non pas sur celui qui est demeuré vierge ; si donc Marie n’était point humble, le Saint-Esprit ne serait pas venu reposer sur elle. Or, s’il ne s’était point reposé sur elle, il ne l’aurait point rendue mère. Comment en effet aurait-elle pu concevoir de lui sans lui. Il est donc bien évident qu’elle n’a conçu du Saint-Esprit, comme elle le dit elle-même, que