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de même du péché ; quoiqu’il ne règne plus en maître, dans notre corps mortel, cependant il n’en est pas entièrement banni ; c’est ce qui fait que saint Paul, loin de se glorifier d’être complètement délivré de la loi du péché et de la mort, se plaint, au contraire, d’être encore, en quelque chose, sous leur empire, quand il s’écrie, en parlant du péché : « Je sens une autre loi dans mes membres, etc. (Rom., VII, 23), » et qu’il gémit du poids qui l’accable encore ; certainement il veut parler de la loi de la mort quand il dit qu’il attend la rédemption de son corps (II Corinth., V, 2).

29. Ces pensées et beaucoup d’autres du même genre que chacun peut avoir en pareille matière, naissent tout naturellement dans les âmes chrétiennes au souvenir du sépulcre de Jésus-Christ ; mais je me là figure que l’âme de celui qui le contemple de ses propres yeux doit être touchée d’une bien douce émotion, et qu’il n’est pas indifférent de voir des yeux du corps la place où le Seigneur a reposé ses membres car, si son corps n’y est plus maintenant, il n’en est pas moins, pour nous, rempli d’heureux mystères, pour nous, dis-je, si toutefois nous tenons pour vrai avec autant d’amour que de foi ce que l’Apôtre nous dit en ces termes : « Nous avons été ensevelis avec lui par le baptême, pour mourir au péché, afin que, comme Jésus-Christ est ressuscité d’entre les morts, par la gloire de son Père, nous marchions, nous aussi, dans les sentiers d’une vie nouvelle. Car si nous avons été entés sur lui par la ressemblance de sa mort, nous le serons également par la ressemblance de sa résurrection. (Rom., VI, 2). » Quel bonheur pour ces pèlerins quand, après les fatigues sans nombre d’un long voyage, et une foule de périls auxquels ils se sont vus exposés sur terre et sur mer, il leur est enfin permis de se reposer là même où ils savent qu’a reposé le corps du Seigneur ! Il me semble que, dans l’excès de leur joie, ils ne sentent plus la fatigue et ne comptent plus pour rien les frais du voyage ; mais, comme s’ils avaient enfin obtenu la récompense de leurs peines et remporté le prix de la course, pour me servir des expressions mêmes des saintes Écritures, ils sont inondés de bonheur d’être arrivés au tombeau du Sauveur. Il ne faut pas croire que c’est par hasard, subitement et comme par suite d’une sorte d’engouement populaire que ce sépulcre est devenu si fameux, car Isaïe longtemps d’avance en a parlé ainsi dans ses prophéties : « En ce temps-là, le rejeton de Jessé sera exposé aux yeux de tous les peuples comme un signe de ralliement, et les nations viendront lui offrir leurs prières ; son tombeau sera glorieux (Isa., XI, 10). » L’oracle prophétique se vérifie maintenant, il est nouveau pour nous dans son accomplissement mais il est ancien dans les saintes Écritures, et si nous sommes heureux de le voir s’accomplir sous nos yeux, nous n’en avons que plus de respect pour son antiquité. Mais en voilà assez sur le tombeau du Sauveur.


CHAPITRE XII
Bethphagée

30. Que dirai-je de Bethphagé, le hameau des prêtres, que j’allais oublier ; de Bethphagé qui rappelle le sacrement de la confession et le mystère du