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Et de fruits naturels le cristal enrichir ;
Le firmament s’y voit, l’astre du jour y roule ;
Il s’admire, il éclate en ce miroir qui coule,
Et les hôtes de l’air, aux plumages divers,
Volant d’un bord à l’autre, y nagent à l’envers,
La Rumeur est muette aux approches de l’ange,
Elle n’a plus de bouche ; en yeux elle se change ;
Que s’il en est quelqu’une, elle provient des sons
De mille rossignols perchés sur les buissons,
Où, faisant retentir leur douce violence,
Ils rendent le bruit même agréable au Silence,
Et d’accents gracieux lui forment un salut
Qui se peut égaler aux charmes de mon luth.
A l’air du temps si beau mille bandes légères,
Mille bruyants essaims d’abeilles ménagères,
Vont boire le nectar en des coupes de fleurs
Où de l’aimable Aurore on voit rire les pleurs ;
Le gentil papillon voltige sur les herbes,
Il couronne leurs bouts de ses ailes superbes,
Et, par le vif émail dont se pare son corps,
Qui des plus beaux bouquets efface les trésors.
Fait qu’il semble aux regards que l’abeille incertaine
Dans ses diversités se trouve comme en peine,
Et que son œil confus, suspendant son désir,
D’une fleur ou de lui ne sache que choisir.