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Il crie en se dressant : Le voilà dans le piège, C’en est fait, je le tiens, il est pris, l’enchanteur, Qui de ces fugitifs est le beau conducteur ; A ce coup il verra sa finesse trompée ; Je ferai tout passer par le fil de l’épée. Là, d’un côté les monts et de lautre les flots Tiennent à mon souhait ces perfides enclos ; Et quand bien cette mer ne serait pas vermeille, Enflammé du courroux qu’en mon sein je réveille. Je la ferais rougir du sang que j’épandrai Dès l’horrible moment que sur eux je fondrai.

Jacob, qui de sa paix sent troubler la bonace Par le bruit furieux d’une telle menace. Que le vent de l’effroi porte jusqu’à lui. S’étonne, est accablé sous un mortel ennui ; Et, dans le désespoir, l’insolence et la crainte, Osant faire à Moïse une outrageuse plainte, Sans songer au futur, sans égard du passé, Vomit avec aigreur ce langage insensé :

Donc, ô présomptueux, pour plaire à ton envie, Nous devions en ce bord achever notre vie ! Quoi ! les gouffres du Nil manquaient-ils de cercueils Qu’il en fallût chercher autour de ces écueils ? Où nous as-tu conduits ? Crois-tu qu’il soit possible De soutenir ce camp en armes invincible ? Sommes-nous des poissons,sommes-nous des oiseaux Pour franchir aisément ou ces monts ou ces eaux ? O folle ambition 1 ô gloire déréglée !