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Ses parens, un peu loing d’elle,
De longs cria perçans les cieux,
D’une passion fidelle
Demandoient secours aux dieux ;
Et voyans, à leur priere,
Par cette vaste carriere
Ce hardy prince voler,
Croyoient que ce fust Mercure
Qui fendist la nue obscure
Pour les venir consoler.

Aux charmes de ce visage,
Où deux astres esclattoient,
Il pensa perdre l’usage
Des plumes qui le portaient ;
Et peu s’en fallut que l’onde,
D’une œillade vagabonde
Contemplant cet amoureux,
Ne luy vist, comme un Icare,
Noyer en son sein barbare
Ses désirs trop genereux.

Enfin, r’appellant son ame
De ce long ravissement,
Devers l’objet qui l’enflâme
Il s’abbaisse doucement ;
Puis, imprimant sur l’areine
D’une allure autre qu’humaine
La distance de ses pas,
Plein de respect il s’approche
De l’impitoyable roche
Où l’on voyoit tant d’appas.

Ce chef-d’œuvre de nature,
Ce miroir de chasteté,
Qui mesme en cette posture
Observoit l’honnesteté ;