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Quelle merveille que ces tours,
Qui valent bien celles de Troye,
En l’heureux terme d’onze jours
De mon prince ay’nt esté la proye

Mercy le Preux et Jean de Vert[1],
Privez de force et de courage,
S’estans reduits loin à couvert,
N’oserent retenter l’orage.

Le rusé duc dont le bon-heur
Depuis tant d’ans regne en Baviere[2],
Dolent de voir leur deshonneur,
Fit de ses yeux une riviere.

Le Danube, à qui l’on conta
Du Rhin sousmis[3] l’estrange histoire,
Blesmit de crainte et se hasta
De l’aller dire à la mer Noire.

L’Ocean l’apprit aussi-tost
Par la bouche du vaincu mesme,
Et, dans l’abysme qui l’enclost,
Trembla pour son grand diadesme.

Il craignit nos bras trionfans,
Et qu’après qu’un heur si prospere
Auroit douté tous les enfans,
On ne voulust donter le pere.

  1. Célèbre général au service de l’Empire pendant la guerre de Trente Ans.
  2. Wolfgang-Guillaume, duc de Baviere-Neubourg, né en 1578, catholique en 1614, mourut en 1653. — Il fut mêlé aux affaires d’Allemagne.
  3. Quand le duc d’Enghien passa le Rhin ; Voiture lui adressa une lettre singulière, La commère la Carpe à son compère le Brochet.