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Les cannes au doux suc, non dans les marescages,
Mais sur des flancs de roche, y forment des boccages
Dont l’or plein d’ambroisie eclatte et monte aux cieux.

L’orange en mesme jour y meurit et boutonne,
Et durant tous les mois on peut voir en ces lieux
Le printemps et l’esté confondus en l’autonne.



L’HYVER DES ALPES.

SONNET.


Ces atomes de feu qui sur la neige brillent,
Ces estincelles d’or, d’azur et de cristal
Dont l’hyver, au soleil, d’un lustre oriental
Pare ses cheveux blancs que les vents esparpillent ;

Ce beau cotton du ciel de quoy les monts s’habillent,
Ce pavé transparant fait du second metal[1],
Et cet air net et sain, propre à l’esprit vital,
Sont si doux à mes yeux que d’aise ils en petillent.

Cette saison me plaist, j’en ayme la froideur ;
Sa robbe d’innocence et de pure candeur
Couvre en quelque façon les crimes de la terre.

Aussi l’Olympien la void d’un front humain ;
Sa collere l’espargne, et jamais le tonnerre
Pour desoler ses jours ne partit de sa main.


  1. L’argent. L’âge d’or fut suivi de l’âge d’argent.