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De leurs pensers est le plus rude orage ;
Leur espoir craint et tremble à touts propos,
Et ton travail les prive de repos.
Mais la victoire, et riante et soudaine,
Graces au ciel, les va tirer de peine ;
Desja ta main de la palme jouit,
Et leur tristesse en l’air s’esvanouit.
J’entr’oy d’icy mille belles harangues
Qu’à ton retour les plus disertes langues
Te batiront par toutes les citez
Où pour nous voir tes pas seront portez.
La, d’une trongne honorable et civile,
Maint magistrat, enflé d’un corps de ville
Et revestu comme en un jour pascal,
Mettra ton los en son point vertical ;
L’un te plaira, l’autre te fera rire ;
L’autre, esgaré sur la mer du bien dire,
Et ne sçachant en quel havre surgir,
Te fera mesme et suer et rougir ;
Voire, en chemin tu ne verras hostesse
Se presenter à ta royale altesse,
Qui, bredouillant maint terme saugrenu,
Ne t’en fagotte un compliment cornu ;
Et je ne sache aucun curé champestre
Qui de caquet ne te vueille repaistre,
Ni gros consul, ni petit eschevin,
Qui pour le moins ne t’apporte du vin.
Hé donc ! bons dieux ! lie ! bons dieux ! que sera-ce
Lors que Paris (tousjours en mesme place)
Tu reverra de gloire environné,
Et de lauriers dignement couronné !
Que d’allegresse et de cris agreables !
Que de saints en respect incroyables !
Que de regars ! que d’applaudissemens !
Que de rumeurs et de tremoussemens !