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la pension qu’il recevoit de la reine de Pologne, avec le produit de ses ouvrages, fort estimés avant Boileau, avec l’amitié qu’avoient pour lui le duc d’Arpajon, les divers membres de la famille de Retz, et bien d’autres grands seigneurs, nous avons peine a croire qu’il ait été dans cette misère noire que lui ont généreusement prêtée plusieurs satires.

Enfin, si Saint-Amant ne trouvoit pas en France la fortune, il avoit un asile ouvert à la cour de la reine de Pologne, qui faisait de lui une estime particulière. Lorsqu’il se rendit auprès d’elle, il y trouva avec de bons appointements, le titre de conseiller d’État de la reine et de gentilhomme ordinaire de sa chambre. Le désir de présenter à sa protectrice son poème du Moïse sauvé, auquel il travaillait depuis long-temps, l’avoit décidé à faire ce voyage.

Pour se rendre à Varsovie, il passa par la Flandre ; mais il fut arrêté et conduit à Saint-Omer, où il resta quelque temps en prison. On fouilla ses papiers ; le Moïse fut saisi, et, sans le nom de la reine qu’il invoqua, « le Moïse sauvé — c’est lui qui parle — étoit le Moïse perdu. »

À Amsterdam, il rencontra Chanut, ambassadeur près la reine de Suède, un des compagnons d’étude au collége de la Marche. Ils se lièrent bientôt d’amitié sous le patronage de leur ami commun, et de là des vers à Chanut.

L’accueil qu’il trouva en Pologne fit oublier à Saint-Amant et son arrestation à Saint-Omer, et les fatigues du voyage, et les désagréments des hôtelleries. Il resta en route jusqu’à l’entrée du carême ; il arriva à temps pour faire des stances sur la grossesse de la reine de Pologne, et, avec les stances, des prédictions qui ne réussirent pas.

« La reyne de Pologne estoit accouchée d’une fille ; sur quoy monsieur de Saint-Amant fit des vers qui nous furent envoyés de Varsovie, où il estoit alors. Mais l’augure qu’il fit pour la naissance de la princesse royale ne fut pas accomply selon ses souhaits et les nôtres, puis