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Ne me trahit, ou si dame Atropos
Ne rafle en bref ma vie entre les pots.
Retournant donc sur mes premieres erres,
Je te diray, sans plus parler de guerres,
Qu’en ce papier barbouillé plaisamment,
Pour t’ebaudir en ton esloignement,
Tes yeux vitrez n’apprendront point les choses
Qui font en cour tant de metamorphoses.
Et que ta voix, en voulant estre aussy,
D’un ton nazard ne lira point icy,
Sous la faveur de tes bezicles vertes,
Par quels moyens on les a decouvertes ;
Quel soin il faut à regir les estats,
À les sauver des lasches attantats,
Si de Themis la juste diligence
En un tel fait peut user d’indulgence,
Ou si la mort douce comme un chardon,
Doit bien-tost dire : lngrat, point de pardon.
Cela n’est point du gibier de ma rime :
Le blanc outil dont mon pouce s’escrime
N’ouvre le bec, n’en crache rien de noir,
Que pour t’offrir en ton vaste manoir,
En ton antique et fort Chasteau-Trompette,
Où pend au croc mainte vieille escopette,
Cent grand-mercis de la part de mon goust
Pour un present cher et de peu de coust,
Pour un morceau l’effroy des sinagogues[1],
Pour un jambon que d’une ame en ses gogues,
D’une main franche et d’un cœur deployé,
Jusqu’à Paris tu nous as envoyé.
Je dis nous as, car l’auguste princesse[2],
Que d’exalter tout le monde ne cesse,

  1. On sait que les Juifs évitent de manger la viande de porc.
  2. Sans doute la comtesse d’Harcourt. Elle étoit, quand elle