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Le chant royal et le gay triolet,
R’entrent en vogue et prosnent leur rolet.
Je connois bien qu’il faut que l’anagrame,
Et l’acrostiche[1], et l’echo qu’on reclame,

    suivant le convoi tout en larmes ; mais on chercheroit en vain des triolets dans les œuvres de ces deux poètes. — Le plus ancien exemple de triolet que nous connaissions se trouve dans le roman de Cléomadès, par Adenès Le Roy. Glarmondine, dans un instant où Cléomadès la laissoit seule sous un frais ombrage,

    Une chançonnete chanta
    Tele que je vous diray jà.

    Et cette chansonnette est un véritable triolet :

    Diex ! trop demeure mes amis.
    Tart m’es que le revoie.
    Li biaus, li courtois, li jolis ;
    Diex ! trop demeure mes amis !
    Puis qu’en luy sont tous biens assis.
    Pourquoi ne l’ameroie ?
    Diex ! trop demeure mes amis :
    Tart m’est que le revoie.

    Saint-Amant n’est pas le seul qui ait remarqué cette vogue extraordinaire des anciens genres qu’on renouveloit. Dans sa Nouvelle allégorique, ou histoire des troubles arrivez au royaume Eloquence, Furetière, parlant de la reine Eloquence, dit :

    « Au milieu de ses troupes eclatoit la Reine avec toute sa douceur et sa majesté, environnée d’un petit corps d’archers ou chevau-legers de sa garde, commandez par des officiers de nouvelle creation et qui servaient par quartier. Les uns se nommoient Ballades, les autres Énigmes, les autres Triolets, tous pourveus à la nomination d’une dame appelée la Mode, qui avoit depuis peu obtenu beaucoup de credit auprès de la reine. »

  1. On se rappelle, dans le Poète crotté, ces deux vers :

    J’ay veu qu’un sonnet acrostiche,
    Anagrammé par l’emistiche…

    Un exemple curieux d’anagramme se trouve au-dessous du