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Et ce n’est rien qu’un corps sans bouche,
Privé des nobles appetis.

À qui dois-je donc m’addresser ?
À Mars, dont la fiere planette
Brille d’une clarté plus nette
Qu’un verre qu’on vient de rincer.
Aussi bien est-il nostre guide ;
Aussi bien les piliers d’Alcide
Frissonnent de le voir pour nous,
Et devant ce brave homicide
Atlas se presente à genous.

Releve-toy, vieux crocheteur !
L’Olimpe pourroit choir en l’onde,
Et prendre comme un rat le monde
Sous son enorme pesanteur.
Ce n’est point toy que l’on menace :
Banny la crainte qui te glace,
Et pren garde à ce que tu fais,
Si tu ne veux perdre la place
De monarque des porte-fais.

Mais n’apperçoy-je pas aux cieux
Voguer le pin des Argonautes,
Qui me reproche mille fautes,
En se decouvrant à mes yeux ?
Ouy, c’est luy qu’en mer on adore ;
ll me dit (car il jaze encore
Comme il faisoit au temps passé)
Que je ne suis qu’une pecore
De boire et de l’avoir laissé.

Pardon, ô celeste vaisseau !
Avec soif je te le demande,
Et veux, pour t’en payer l’amende,
Que ma tasse devienne seau.