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C’est donc une chose arrestée,
Disoit ce pauvre amant plein d’ardeur et de foy,
Que je souffre à jamais pour toy,
Cruelle Pasithée !
Et que ton cœur, au lieu d’en soupirer,
Feigne de l’ignorer !

Tes beaux yeux, les rois de mon ame.
Après m’avoir soumis à leur divin pouvoir,
Feront semblant de ne point voir
Ma vive et pure flame,
Et ton oreille entendra sans pitié
Gemir mon amitié.

Ha ! rigueur trop longue et trop dure !
C’en est fait, je me rends à ta fiere mercy.
En vain ces houlx flattent icy
Mes maux de leur verdure,
Il faut perir : Amour ne m’offre en eux
Qu’un espoir espineux.

Comme il achevoit cette plainte,
Un long cry de hybou, douloureux et tremblant,
D’un mortel effroy l’accablant,
Le fit paslir de crainte ;
Et maint aspic, siflant autour de luy.
Redoubla son ennuy.

Un ruisseau plein d’inquietude,
Murmurant sur le dos d’un aspre et vieux rocher
Du mal qu’il avoit à marcher
En un chemin si rude,
Representoit le lamentable cours
De ses penibles jours.

Le tronc noir et sec d’un erable,
Par le courroux du ciel foudroyé depuis peu