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Et de voir comme en vostre face
La neige se conserve auprez de deux soleils !

Mais en quel sublime degré
Leur voix louoit-elle à mon gré
La vostre, où tant de grace abonde,
La vostre dont le son a des charmes si dous,
Que nul que l’echo seul au monde
Ne s’oseroit offrir de chanter après vous !

Bref, de tant de rares tresors
Qui font vostre ame et vostre corps,
Qu’oublierent-elles à dire ?
Encore que ma plume avecque verité,
Dans ces vers pourroit faire lire
Que vous en possedez plus d’une infinité.

Tous les rossignols d’alentour,
Qu’on oit se plaindre et nuit et jour
D’une lascive tirannie,
Coupans l’air de leur aile aux mouvemens soudains,
Pour jouir de cette harmonie,
Se venoient là percher sur les testes des dains.

Ce demon tranquille et secret.
Qui cheminant d’un pas discret
Assoupit toute violence,
De leurs divins accors estoit si bien seduit
Qu’il faisoit voir que le silence
Peut en quelque façon estre amoureux du bruit.

Mainte estoile, tombant des cieux
Et disparoissant de mes yeux
Comme une chose evanouye,
Sembloit descendre en terre avecque le dessein
D’y changer sa veue en ouye
Pour ecouter la voix qui parlait de leur sein.