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En y mettant Lysis, et qu’il m’est defendu
De chercher seulement le bien que j’ay perdu.
Je m’abandonne aux pleurs, je trouble tout de plaintes,
Un mortel desespoir me donne mille attaintes,
Et, parmy les tourmens qui m’ostent le repos,
Songeant à ses escrits, je dis à tous propos :
Ô belle Polixene[1] ! amante infortunée !
Tu dois bien regretter sa courte destinée,
Puis qu’une telle fin t’interdit d’esperer
Celle des longs travaux qui te font souspirer !
Ô precieux enfant d’une si rare plume !
Beau livre ! grand tresor, mais trop petit volume !
Ouvrage que la mort empescha de finir !
Je croy que t’ayant veu, tout bon sens doit tenir
Que la plus belle chose, en quoy que l’on souhaitte,
Se pourra desormais appeller imparfaite,

  1. François de Molière, sieur d’Essartine, mourut assassiné, jeune encore, en 1628. Lenglet-Dufresnoy, dans sa Bibl. des romans, ne cite que la Polyxène, dont il indique les édit. de 1632 et de 1645 ; j’en possède une de 1623. Outre la Polyxène, vantée aussi par Racan, Molière a composé quelques lettres, qui se trouvent dans le recueil de Faret. Sorel, dans ses Remarques sur le Berger extravagant, se moque du début amphigourique de Polyxène (Berger extrav., 3e partie, Rouen, 1646, p.255 des Remarques qui suivent). — À la page 19 des mêmes Remarques, Sorel cite un autre ouvrage, peu connu, de Molière, la Semaine amoureuse, dont il blâme « les noms à la grecque ».

    La Polyxène est dédiée à la princesse de Conty. Le privilége, daté de 1622, semble donner l’ouvrage comme complet dans ses quatre livres. Les quatre pages d’errata qui suivent sont curieuses, et montrent quelle importance l’auteur attachoit à son style. — Ce livre est un des nombreux romans qui sont venus, à la remorque de l’Astrée, escompter la gloire de cet ouvrage. À vrai dire, c’en est un épisode. — En 1627, un sieur de Molière étoit lieutenant d’artillerie au siége de l’Île de Ré. (Hist. de Richelieu, par Aubery, p. 57.)