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En vain ta rigueur inflexible
Te porte à ce mauvais dessein,
Que tout esprit qui sera sain
N’estimera jamais possible ;
Si ce n’est que la verité
Nous fasse voir par quelque preuve
Que devant le soleil on treuve
La fraischeur et l’obscurité.

Hé ! ne crains-tu point la furie
De ces animaux enragez,
Qui tant de fois ce sont chargez
De l’honneur de ma bergerie ?
Non, tu les verrois sans effroy,
Et leur irois faire la guerre,
Sçachant bien qu’en toute la terre
Rien n’est cruel au prix de toy.

Fiere Nymphe, qui fais trofée
D’un naturel sans amitié,
Et triomphes de la pitié
Dessous ton orgueil estouffée,
Quoy ! tu ne veux pas revenir !
Et les ronces, en m’ayant plaindre,
Afin que je te pusse atteindre
Ont taché de te retenir !

Dieux ! qui vit jamais telle chose !
On peut bien dire maintenant
Que l’espine en te retenant
À plus de douceur que la rose.
Je te compare à cette fleur
Par ta beauté qui lui ressemble,
Bien qu’elles different d’ensemble
En la cause de la couleur.

Car cette agreable merveille
Que Flore met à si haut pris